Le elearning doit s’inspirer du marketing et du design

La faute originelle du elearning vient du fait que ce sont des ingénieurs qui l’ont « inventé ».
Né aux Etats-Unis, le elearning a été d’abord un jouet technologique qui nécessitait-et même encore de nos jours- des compétences informatiques fortes. Les premières start-up qui se sont montés ont embauché des ingénieurs informatiques, puis des ingénieurs pédagogues et des linguistes pour garantir la qualité des cours et mettre en place des scénarios pédagogiques que des informaticiens ne pouvaient réaliser.

Ce premier élan, sur lequel nous sommes toujours, a permis de proposer une offre informatique de qualité structurée autour de deux axes principaux : les plates formes et les contenus, réalisé grâce à des logiciels dédiés ou des logiciels rapid learning. Les ingénieurs pédagogues ont inventés de nouvelles approches, et innovent, ou plutot suivent les tendances, constamment. La réflexion autour de l’apport de Twitter et des réseaux sociaux montre bien la capacité des acteurs du elearning à se saisir des nouvelles tendances et à en retirer le meilleur.

En revanche, le virage du graphisme et du design est encore insuffisamment pris. Bien sûr, les équipes elearning se dont dotés de graphistes qui ont été chargés de réaliser le packaging des contenus. Bien sûr, la réflexion graphique n’est pas absente, notamment lors de la création de serious game. Mais au final, le graphisme est perçu comme un emballage, comme le parent pauvre du elearning. A l’informatique le support, à la pédagogie le contenu, et au graphisme le packaging.

La relation aurait pu être équilibrée, mais ce n’est pas le cas. Les informaticiens et les pédagogues n’ont pas une formation en graphisme. Les codes du elearning et de la communication d’entreprise sont déjà solidement établis et la remise en cause n’est pas évidente.

Pourtant le graphisme et le marketing ont beaucoup de chose à nous apprendre. Alors que le elearning ressemble parfois beaucoup à la publicité des années 50 (une mascotte rassurante mais enfantine, des personnages de lessive de ménagères, des couleurs de fanions de boy-scouts, et des phrases que l’on dirait sorti de livres d’ados), le marketing et le graphisme sont allé explorer beaucoup, beaucoup plus loin. Création d’une identité de marque, marketing virale, dialogue de marque, révolution du design sur Internet avec l’apparition d’un graphisme type « Ikea », les deux grands frères du elearning sont en train d’effectuer leur révolution numérique.

Les agences d’elearning peuvent répliquer que réaliser des contenus luxueux coûtent cher. Que les clients ont des budgets toujours au plus juste, et négocie parfois âprement les prix. Ils ont raisons, les budgets formation n’ont pas l’importance stratégique que peut avoir la communication. Encore le marketing se plaint-il souvent d’être le parent pauvre de l’entreprise mais passons. Ces arguments sont désormais dépassés. Il est possible de réaliser des contenus avec une qualité graphique très supérieur si l’on met en place des règles de base simples.

1) Etre à jour des dernières tendances graphiques. il y a une mode des formes, une mode des couleurs, une mode des traits, une mode de la typographie. Il faut savoir identifier les axes clés et les réutiliser dans les contenus elearning. Vous pensez qu’un bouton carré, ca suffit ? vous avez tort. La mode, ce sont les formes courbes. Courbes et pas rondes, attention, la différence est essentielle.

2) Oser les couleurs. La couleur en elearning, c’est un gros problème. Le monde serait plus simple en noir et blanc. Pédagogues et informaticiens, sont beaucoup plus à l’aise en noir et blanc. Les premiers ont travaillé sur des feuillets toute leurs études, les seconds sont devant des lignes de codes où les couleurs sont… peu nombreuses. Il faut être plus innovant, utiliser des nuanciers, s’inspirer des derniers sites d’internet.

3) Abandonner la communication candy. Vos interlocuteurs sont des adultes, ils sont mariés, ont des enfants. Ils ont eu des problèmes, parfois très graves. Ils ont souffert, parfois même beaucoup. Quand vous faites une formation qui pourrait être insérée dans Pocahontas de Disney tellement vous êtes mielleux, vous loupez votre cible. Dans Avatar, le tout dernier blockbuster d’Holywood, le héros est handicapé. Son frère est mort. Il a peur de perdre sa compagne, il se met en colère, il est parfois même violent. Le film a fait plus d’un milliard de dollars.

4) Faire peu coûteux et convaincre. Inutile de proposer des animations Flash dans tous les sens si cela ne rentre pas dans le budget formation. Ce sera refusé. Restons simple. Il faut travailler les détails, travailler la qualité d’éléments simples. Le graphisme, ce n’est pas forcément complexe, ni coûteux. Vous trouvez qu’Ikea coûte cher ? Et en plus ils ont convaincu toute la société occidentale d’abandonner les meubles de leurs grands-parents. Ca n’a l’air de rien, mais c’est une petite révolution.

5) Ne soyez pas révolutionnaire. Dans le monde du elearning, il faut être innovant, mais pas trop. Sachez tenir compte des résistances, des a priori. Prenez votre temps. Eduquez vos collègues, construisez un projet sur le long terme. Discutez, remettez en cause, faites des propositions et surtout négociez. En prenant vos précautions, vous avez de bonnes chances d’arriver à vos fins.